Amilure

Les amis de la montagne de Lure

Photo : travaux en cours sur la centrale le 28 mai dernier

Après la bataille (de l’appel contre la dérogation autorisant la destruction de spécimens et d’habitats d’espèces protégées, gagnée suite au recours d’Amilure contre Boralex et la préfecture) il reste la guerre… et il ne faut pas confondre les deux, comme on le sait.

La question qui se pose maintenant est : comment allons-nous mettre à profit cette décision de justice dans la guerre qui nous oppose à l’opérateur, qui ne semble pas envisager le démantèlement de sa centrale pour si peu – rien n’apparaît à ce sujet dans la salle de presse en ligne de Boralex mais dans les médias (voir communiqué ci-dessous) il veut se montrer confiant. Confiant mais, quand même, une nouvelle dérogation va être recherchée (le défrichement est pourtant derrière nous) et le pourvoi en cassation au Conseil d’Etat est annoncé (ce qui n’est pas anodin). Donc : « Comme il ne va pas pleuvoir, je prends mon parapluie ». Comprenne qui peut.

La situation dans laquelle tous les acteurs de ce film se retrouvent est assez complexe. Boralex doit bientôt mettre en service sa centrale mais son exploitation n’est-elle pas maintenant compromise ? L’arrêt dit bien :

9. L’illégalité relevée n’étant pas susceptible de régularisation, l’association des amis de la montagne de Lure est fondée à soutenir […] que c’est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 17 janvier 2020 et de la décision préfectorale du 25 juin 2020 […]. »

Comment vont réagir la préfecture, Enedis, RTE, EDF ? Rappelons que la dérogation contestée avait été délivrée par le préfet et c’est lui (mais pas l’actuel) qui est désigné dans l’arrêt pour avoir commis une erreur d’appréciation. Mais Boralex ne peut s’en prévaloir : c’est l’industriel qui a choisi d’avancer sans attendre l’épuisement du recours déposé par Amilure, profitant du fait qu’il n’était pas suspensif. C’est donc lui qui doit, aujourd’hui, assumer les conséquences de sa prise de risques, même s’il lui en coûte des millions pour remettre le site dans son état initial.

Contrairement à ce qu’on a pu lire, cet arrêt n’est pas « suspensif ». Un recours peut, selon les tribunaux et les législations, être suspensif : il interrompt la progression d’une action le temps d’être jugé. Mais ici tout est dit – il n’y a rien à attendre. Si Boralex n’avait pas défriché, il serait maintenant tout simplement dans l’incapacité de le faire puisque sa dérogation espèces protégées est annulée. Ce n’est pas une suspension mais un rejet d’autorisation. Et de toute façon il n’y a désormais plus rien à bloquer ni à autoriser : nous sommes devant le fait accompli imposé par l’opérateur, qui revendique cyniquement l’impunité.

Différentes législations se croisent sur le sujet, et différents types d’actions sont donc envisageables. L’heure est à l’analyse et à la réflexion stratégique et nous nous y employons. Ce qui est clair, à ce stade, c’est que nous irons au Conseil d’Etat si Boralex confirme son intention d’y porter l’affaire, malgré les coûts importants d’une telle démarche – il a deux mois pour s’exprimer.

En attendant, l’audience pour le prochain appel au sujet du projet sur le bois de Seygne à Ongles sera bientôt annoncée. Rappelons que dans cette affaire c’est le permis de défricher que nous contestons (sur Cruis, nous étions arrivés trop tard). Il s’agit de défendre une zone humide, phénomène extrêmement rare sur notre territoire et lieu d’un écosystème remarquable. Puis viendra le cas de Malaga, à Aubignosc où nous contestons à la fois les permis de défricher et de construire.

Le fait d’engranger des victoires ne préjuge pas des batailles prochaines, mais cela consolide nos positions et nous donne le courage de continuer à nous battre – il en faut.

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Communiqué de la société Boralex suite à l’arrêt de la Cour administrative d’appel

Boralex a déposé le 13 août 2019 une demande de dérogation espèces protégées dans le cadre du projet photovoltaïque de Cruis. Le 17 janvier 2020, un arrêté d’autorisation nous a été délivré, accordant une dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées. Contestée, cette dérogation a été confirmée par le tribunal administratif de Marseille le 2 février 2023, puis annulée le 31 mai 2024 par la Cour Administrative d’Appel de Marseille, en raison d’une irrégularité dans la demande initiale déposée.

L’annulation de la dérogation espèces protégées ne remet pas en cause le droit de Boralex d’exploiter la centrale solaire de Cruis. Elle ne remet pas non plus en cause notre présence sur le site ni les travaux de finition de la centrale, non concernés par cette dérogation espèces protégées.

Néanmoins, nous travaillons activement à résoudre cette situation sous les plus brefs délais afin d’obtenir une nouvelle dérogation.

Durant l’ensemble du chantier du parc solaire de Cruis, les mesures compensatoires figurant dans l’autorisation de dérogation espèces protégées ont été mises en place et continuent à faire l’objet de contrôles réguliers menés par des écologues indépendants.

En dépit de cette annulation, nous maintenons notre engagement à respecter nos obligations, notamment en phase d’exploitation où nous estimons qu’il n’y a pas d’enjeux significatifs.

Nous tenons à rappeler que le permis de construire et l’autorisation de défrichement du projet n’ont pas été remis en cause et sont purgés de tous recours.

Note : Dans une démarche ultérieure, les médias ont reçu de Boralex l’information qu’il allait se pourvoir en cassation au Conseil d’Etat.

 

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Cruis : après la bataille

4 commentaires sur “Cruis : après la bataille

  1. Bonjour,
    Aujourd’hui 12 juin une dizaine d’ouvriers avec 3 véhicules léger raccordaient les panneaux, installaient des caméras , et des vigiles faisaient des allers retour du site A au B à vive allure sur l’ancienne route de mallefougase.
    Les véhicules étaient aux couleurs d’eiffage.
    Sur la route de cruis à st Etienne les travaux de raccordement continuent.

    1. Merci pour ces informations.

      En fait, il n’y a pas de conséquence directe et immédiate de la décision de justice sur les agissements de Boralex. Charge à nous de faire appliquer cette décision dans un contexte administratif complexe où s’entrecroisent plusieurs législations, dans un épisode gouvernemental aux abonnés absents, et auprès d’un préfecture prise en défaut par la Cour d’appel qui ne s’empresse pas du tout de réagir.

      Comme nous l’avons écrit, cet arrêt n’a aucune valeur suspensive. Nous nous employons néanmoins auprès de divers interlocuteurs à faire valoir le défaut d’autorisation de l’opérateur.

      Pour ce qui est de la tranchée, voir la réponse au commentaire précédent.

    1. Merci pour votre signalement. Oui, les travaux de cette tranchée ont débuté près du site il y a quelques mois. Puis ils ont repris depuis le poste source, à Limans. Récemment, ils se sont poursuivi sur la commune de Saint-Etienne. Le raccordement paraît imminent.

      Ces travaux sont menés par des prestataires d’Enedis, maître d’ouvrage œuvrant pour son client, Boralex. Nous n’avons trouvé aucune faille administrative permettant de les interrompre. La dérogation que nous venons de faire annuler concernait le défrichement et les travaux sur le site de la centrale elle-même.

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