Photo d’en-tête : photomontage représentant l’emprise du projet de centrale photovoltaïque que nous tentons d’empêcher.
Voici venue la dernière étape pour le projet « Malaga » avant la décision préfectorale finale.
L’enquête publique est lancée depuis le 26 avril dernier. Vous avez jusqu’au mardi 31 mai 18h00 pour y participer. Pour ceci, deux moyens :
- soit en vous rendant en mairie d’Aubignosc (voir les horaires d’ouverture au bas de cette page) pour renseigner le registre d’enquête, et/ou rencontrer le commissaire enquêteur qui sera présent le mercredi 11 mai de 9h00 à 12h00, le samedi 21 mai de 9h00 à 12h00 et le mardi 31 mai de 14h00 à 18h00.
- soit par courriel à pref-environnement@alpes-de-haute-provence.gouv.fr en précisant dans l’intitulé l’objet et le lieu de l’enquête publique : « avis d’enquête publique relative à une demande d’autorisation de construire un parc photovoltaïque sur la commune d’Aubignosc au lieu-dit “Malaga” ».
Cette enquête publique se déroule dans la plus grande discrétion. On trouve 2 affichages officiels à Aubignosc mais par contre rien au hameau du Forest, situé lui au pied du projet (un comble !), ni sur le site internet de la commune.
Nous vous rappelons toute l’ineptie de cette centrale, que nous avons exposée dans nos pages. Notre objectif est d’obtenir à nouveau un avis défavorable quant à ce projet. Nous comptons sur vous pour ce dernier round !
Notre association a d’ores et déjà contribué à cette enquête. Nous publions ci-dessous le texte que nous avons transmis, qui vous aidera à vous situer par rapport à ce projet, et qui vous sera utile pour formuler votre propre commentaire.
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Contribution d’Amilure à l’enquête publique conjointe préalable à la demande de défrichement d’une surface de 5,9ha et celle d’un permis de construire une centrale photovoltaïque sur la commune d’Aubignosc au lieu dit Malaga.
Monsieur le commissaire enquêteur,
L’association « Les Amis de la Montagne de Lure », Amilure, est indépendante et transparente.
Elle vit du bénévolat, des cotisations individuelles et dons de ses membres et ne reçoit ni subvention ni support d’aucune institution, entreprise ou représentation politique ou de média.
Au regard de ses paysages, sa faune, sa flore, son patrimoine architectural, culturel et historique composant le patrimoine commun conformément à la Convention européenne du paysage, la montagne de Lure est un bien commun que nous devons collectivement défendre et sauvegarder.
Cette prise de conscience, renforcée par le fait que le paysage de notre territoire est aussi façonné par des hommes et des femmes qui y travaillent, nous invite à adopter une approche attentive et pugnace pour respecter les équilibres fragiles qui organisent notre espace collectif.
Mais quand on abat des arbres « très vivants », qu’on détruit la biodiversité et les paysages par des projets industriels de tous ordres, qu’on veut interdire de se promener sur le massif (alors qu’il suffirait de réguler), que l’on s’oppose aux hommes qui respectent l’environnement mais aussi à tous les habitants, acteurs économiques responsables, touristes respectueux et amoureux de notre cadre de vie source de multiples richesses, nous nous devons tous de réagir avec fermeté et constance.
En reprenant quelques points de notre manifeste en préambule et pour démontrer notre intérêt à agir, nous introduisons notre contribution à l’enquête publique que vous dirigez.
Nous n’allons pas répéter tout le mal que nous pensons du projet de centrale photovoltaïque à Malaga-Aubignosc, vous trouverez dans nos pages ce que nous avons écrit lors de la précédente enquête publique d’avril 2021, qui a conduit votre prédécesseur à donner un avis défavorable au projet de la commune et de l’opérateur industriel qui à l’époque s’appelait encore RES.
Si la situation a peu évolué dans l’esprit des promoteurs du projet, pour notre association et sans en douter pour une large partie de la population locale, les derniers rapports du GIEC ont déclenché un signal d’alerte qui dépasse de loin le site de Malaga. Une équation simple doit être résolue : réduire drastiquement l’émission de CO2.
Nous avons cependant déjà établi que 1) nous sommes pour la production photovoltaïque d’électricité, mais aussi que 2) nous sommes pour l’amélioration des puits de carbone (forêts) afin de mieux capter le CO2 émis par l’activité humaine dans l’atmosphère et limiter ainsi le réchauffement climatique par les gaz à effet de serre (GES). Quelles conclusions peut-on tirer de ces deux points ?
- il faut conserver et améliorer les forêts par une gestion sérieuse basée non pas sur la productivité ligneuse mais sur la capacité à stocker le CO2 par la photosynthèse ;
- il faut implanter les panneaux photovoltaïques sur des zones déjà artificialisées – toitures, parkings, autoroutes…
- on doit renoncer à toute artificialisation des zones naturelles, forestières et agricoles.
Que propose-t-on à Aubignosc ?
Il s’agit de défricher 5,9 ha de zone naturelle pour y installer des panneaux photovoltaïques, sans oublier, en référence à l’arrêté préfectoral 2013-1473 du 04/07/2013, que les obligations légales de débroussaillement (OLD) vont réduire la couverture végétale autour de la centrale sur une bande d’une profondeur de 50 m pouvant aller par décision du maire jusqu’à 100m.
Comme l’observe pertinemment l’autorité environnementale dans son avis du 23 avril 2020 (p. 15 à 16) : « La superficie de la bande de 50 m d’OLD autour du parc est significative avec notamment 1,35 ha de zone à enjeu fort pour la biodiversité. »
La surface naturelle visée ainsi portée à plus de 7 ha, fut-elle considérée comme dégradée par une ancienne coupe forestière ou par une végétation souffrant déjà de conditions climatiques difficiles, n’en reste pas moins un réservoir vivant en capacité de contenir du CO2, déjà stocké dans les souches et les racines, et d’en capter encore davantage, tandis que les panneaux photovoltaïques n’en seront jamais capables. Au contraire, leur fabrication puis plus tard leur démantèlement auront généré des émissions importantes de CO2 dans l’atmosphère, passif que la production d’électricité solaire mettra plusieurs années à compenser.
On souhaiterait que l’opérateur ait ces préoccupations en tête, au lieu du dogme productiviste d’une énergie certes décarbonée mais dont l’impact positif en matière de transition énergétique est dérisoire en regard des effets dévastateurs du projet.
Depuis bien longtemps Amilure réclame que les études sur les projets soient accessibles dès leur parution dans des communes concernées. Nous dénonçons « les clauses de confidentialité » que certains opérateurs exigent des élus. Les études d’impact ne sont accessibles à la société civile qu’au moment de l’Enquête Publique, seules les instances qui instruisent le dossier en sont les destinataires (DDT, DREAL, MRAe et quelques associations nationales agréées par l’Etat et la Région). Même dans les commissions consultatives (CDPENAF, CDNPS) les documents d’études ne sont pas complets. Nous contestons ce dysfonctionnement car les populations locales et leurs associations de terrains, par leur connaissance du milieu, pourraient intervenir en amont des décisions des conseils municipaux.
C’est un véritable enjeu démocratique qui mériterait une révision de la procédure.
En effet, l’étude d’impact de 374 pages, plus ses annexes, présentée dans l’enquête publique découragerait plus d’un lecteur, même découpée en 5 parties.
Le bureau d’études Auddicé Environnement a assurément réalisé un document complet mais quasiment impossible à lire « in extenso » et à analyser dans le temps de l’enquête publique.
De l’avis de naturalistes que nous avons sollicités, des enjeux ont été sous-évalués notamment la fragilité du milieu lié au versant sud de la montagne de Lure. Ouvert à semi-ouvert, très exposé à l’ensoleillement et à la chaleur, il accueille un cortège d’espèces composant une trame verte dont la rupture, par l’implantation de la centrale, pourrait mettre en jeu l’existence.
De plus, le cumul des impacts, incluant celui de la carrière située à proximité, dont une extension est prévue, n’a pas été pris en compte alors qu’il est question de classer le site dans le cadre d’un APPB (arrêté préfectoral de protection de biotope).
Il est notable que l’étude d’impact dise dans son paragraphe :
5.6 PATRIMOINE ET PAYSAGE :
5.6.1. RAPPEL DES ENJEUX ET ÉVALUATION DES PREMIERS IMPACTSD’après l’atlas des paysages des Alpes-de-Haute-Provence (04), le développement de centrales photovoltaïques est un des nouveaux facteurs d’évolution des paysages depuis 2003, en particulier sur les plateaux de Puimichel et Valensole, en piémont de Lure et en val de Durance. Ces équipements reflètent le plus souvent des projets techniques, liés à des opportunités foncières, au détriment d’espaces agricoles ou naturels. L’enjeu est désormais de raisonner le développement des énergies renouvelables sur la base de réflexion globale et intercommunale sur les questions de transition énergétique, et en privilégiant les sites déjà anthropisés.
On s’attaque à une zone naturelle, sans avoir considéré les prescriptions de l’article L. 163-1 du code de l’environnement issu de la loi du 8 août 2016 (2016-1087) qui écrit que :
Les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité visent un objectif d ‘absence de perte nette, voire de gain de biodiversité. Elles doivent se traduire par une obligation de résultats et être effectives pendant toute la durée des atteintes. Elles ne peuvent pas se substituer aux mesures d’évitement et de réduction. Si les atteintes liées au projet ne peuvent être ni évitées, ni réduites, ni compensées de façon satisfaisante, celui-ci n’est pas autorisé en l’état.
Or il apparaît que les mesures d’évitement conformes à une bonne application de la séquence ERC (éviter/réduire/compenser) ont été négligées pour privilégier la réduction des impacts en les minimisant, afin de conduire à l’absence de mesures de compensation, en dépit des impacts sur des espèces protégées et leur habitat.
Tandis que rapport du GIEC et toutes les autorités scientifiques de la planète dénoncent les effets de la déforestation et la réduction des capacités d’absorption du CO2 de l’atmosphère, sans état d’âme on porte atteinte à des zones naturelles en les artificialisant.
Le caparaçon que constitue la couverture du sol par des panneaux ne le protège nullement : au contraire la vie du sol s’appauvrit à court terme sans l’exposition à une luminosité suffisante et les travaux de chantier tassent le sol et le fragilisent par le battage des pieux. On note justement dans une publication de novembre 2021 que le ministère de l’Écologie fait de la lutte contre l’artificialisation des sols une cause nationale.
Avec la loi Climat et Résilience, une définition de l’artificialisation a été introduite dans le Code de l’urbanisme. Une trajectoire territorialisée de réduction du rythme de l’artificialisation (article 194 de la loi Climat et Résilience) doit désormais être fixée et à déclinée à toutes les échelles dans les documents de planification régionale, puis dans les documents d’urbanisme : SCOT, PLU(i) et cartes communales. En raison de l’absence, dans l’immédiat, de données pour mesurer l’artificialisation des sols, ce sont celles de consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers que la loi fait le choix de prendre en compte pour les dix premières années à compter de l’adoption de la loi du 22 août 2021.
Monsieur le Commissaire enquêteur, le cumul de tels projets dans le massif de Lure est insupportable pour de nombreux habitants. L’émotion est grandissante contre les affairistes de l’énergie verte.
Nous réaffirmons que nous soutenons des projets photovoltaïque mais pas n’importe où, et surtout pas au détriment des espaces naturels agricoles et forestiers. C’est pourquoi Amilure a lancé une pétition qui a déjà recueilli plus de 3000 signataires, pour réclamer en urgence un moratoire sur les projets de développement d’énergies renouvelables (EnR) industriels qui ne s’inscrivent pas dans des zones anthropisées comme des ombrières, des friches industrielles, des toitures…
C’est aussi pourquoi nous attendons de votre analyse de la situation un nouvel avis défavorable sur le défrichement (et pour le permis de construire une centrale photovoltaïque) à Malaga.